Paul Krugman est, à ma connaissance, le seul Prix Nobel d'économie des quarante dernières années à développer une pensée anti-libérale. A ce titre, les citoyens de gauche le respectent sur tous les continents. Or, le voilà qui manifeste sa déception à l'égard des récentes annonces de Hollande. Il qualifie ses propositions de "soumission" à l'idéologie dominante*.
Pour la France, cependant, il demeure positif: "...la France n'est pas si mal lotie. Certes elle reste à la traîne derrière l'Allemagne (portée par ses exportations), mais obtient de meilleurs résultats que la plupart des autres pays européens...La croissance française a même dépassé celle des piliers de l'orthodoxie libérale comme la Finlande et les Pays-Bas".
Heureusement Krugman situe bien le coeur du problème dans l'Europe en crise. Ce qu'il appelle le centre-gauche (lire la social-démocratie), n'a pas su inventer une nouvelle politique pour combattre celle des partisans de l'austérité. En somme, il voudrait que nous affrontions le monde entier du libéralisme, dans la solitude. Les Français affronterions seuls le FMI, la Commission européenne, les agences de notation et la nébuleuse de la finance. Don Quichotte combattant les moulins à vent.
Je respecte profondément la personnalité de Paul Krugman, et partage ses analyses que je juge pertinentes.
Il est fondé à critiquer et à exprimer ses déceptions. Mais la gauche française gouverne et, si elle comprend les critiques exprimées de bonne foi, elle est en droit d'attendre, de la part d'un Prix Nobel progressiste, des propositions concrètes pour sortir de la crise sans toucher aux acquis sociaux, quand on n'a, comme Hollande, aucun allié dans le monde pour soutenir une telle politique?
* The New York Times du 16 janvier
Antoine Blanca