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20 avril 2013 6 20 /04 /avril /2013 12:04

70 ans après l'insurrection du ghetto de Varsovie

 

J'ai mon propre vécu de l'insurrection du ghetto de Varsovie. Je vais rapidement le partager  avec vous. Bien entendu ce vécu se situe sur le terrain purement commémoratif, à l'intérieur du Bund socialiste juif qui, à Paris, organisait chaque année une cérémonie pour honorer ses combattants et leur héroïsme chargé de symbolisme et de désespoir. Je ne sais pas s'il existe encore une section française de ce qui fut le Bund.

A vrai dire je savais peu de choses du monde des juifs de l'ancien empire russe et de leur parti ouvrier. Fils de réfugié politique espagnol en Algérie, "mes"juifs appartenaient à un tout autre univers. Ils étaient commerçants ou artisans; l'empire que leurs ancêtres avaient connu était l'Ottoman, non le Russe; et leur langue était l'Arabe, pas le Yiddish. Mon père, très bien informé sur presque tous les sujets, m'avait expliqué l'essentiel sur Askhénazes et Sépharades. Il avait ajouté que dans notre village de Boghari, seuls le rabbin et le notaire, président du Consistoire local, avaient entendu parler des particularités des Juifs d'Europe centrale et orientale. Ils découvraient, en même temps que tout le monde, le génocide et sa dimension historique

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Présent à Paris en avril 1960 pour participer à une réunion du Comité national des Jeunesses socialistes, je fus à la fois surpris, et honoré, que l'on me confiât la mission de représenter le PS-SFIO à la cérémonie commémorative de l'insurrection du Ghetto. On me donna quelques adresses, et je pus réunir des informations minimales pour me permettre de prendre la parole.


C'étaiit dans un cinéma proche des boulevards et de République. Une cérémonie funèbre, sans éclairage et sans applaudissements. Je me suis rarement senti aussi intimidé, seul à  la tribune d'orateur, devant 300 militants silencieux, aux côtés de deux survivants du ghetto et de membres du Bureau du Bund. C'était alors le 27e anniversaire du soulèvement qui n'avait d'autre but que de mourir les armes à la main plutôt que dans un camp d'extermination. J'avais déjà lu un livre racontant l'insurrection du camp de Treblinka. Trois survivants de cet événement étaient d'ailleurs, aussi, présents dans l'assistance. Ce qui me frappa en outre, dans cette cérémonie funèbre, ce fut son esprit complétement laïc. Personne ne portait de kipa. Aucun rabbin n'appela à la prière. Le Bund n'était pas sioniste à l'origine. Ses membres devaient se diviser par la suite sur le sujet. Aucun représentant de l'Ambassade d'Israël ne prit officiellement la parole, du moins à ma connaissance. Un meeting silencieux n'était pas dans mes habitudes. Les allocutions furent brèves. Certaines furent prononcées en Yiddish. Je fus raccompagné en silence. Une fois sur le boulevard Bonne Nouvelle, j'eus un peu de mal à retourner sur terre. Comme si je revenais d'un monde disparu.

 

Antoine Blanca

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  • : Le blog de Antoine Blanca
  • : Blog politique dans le sens le plus étendu:l'auteur a une longue expérience diplomatique (ambassadeur de France à 4 reprises, il a aussi été le plus haut dirigeant de l'ONU après le S.G. En outre, depuis sa jeunesse il a été un socialiste actif et participé à la direction de son mouvement de jeunesse, du Parti et de la FGDS. Pendant plusieurs années il a été directeur de la rédaction de "Communes et régions de France et collaborateur bénévole de quotidiens et revues. Il met aujourd'hui son expér
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