30 juillet 2012
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Les Kurdes de Syrie sont environ 2,5 millions et, dans la drôle de guerre qui saigne le pays dont ils sont citoyens, ils se sont faits, jusqu'ici aussi discrets que possible. Tant que les opérations ne toucheront pas leur région ils continueront de faire le dos rond. Mais les choses commencent à changer depuis que les incidents se multiplient à la frontière turque.
La Turquie est à la fois leur bastion ethnique et culturel (plus de la moitié d'entre eux en sont originaires), et l'Etat qui leur accorde le moins de liberté de mouvement. La Turquie est une république très centralisée, où tout part et revient à Ankara. Les événements qui agitent la Syrie voisine inquiétent d'autant plus le gouvernement Erdogan qu'ils mettent en péril la trêve fragile qu'il avait conclue officieusement avec les combattants du PKK, bras armé des Kurdes de Turquie. Quant aux kurdes syriens, ils se sont rassemblés autour de leurs chefs naturels et observent, l'arme au pied, les événements. Qui tirera le premier?
La minorité kurde de Syrie vivait jusqu'ici en paix avec le régime de Damas. Bien que musulmane sunnite, elle ressent une forte méfiance vis-à-vis de la seule opposition syrienne réelle, la confrérie des Frères, à la fois sunnite, très centraliste arabe, et favorable à l'instauration de la Charia. Le pouvoir des Assad leur accordait, au contraire, une notable liberté coutumière et culturelle. En particulier pour l'usage de la langue kurde et de ses dialectes. Bref les représentants de cette minorité étaient traités avec des égards particuliers, aussi bien par l'exécutif, par l'Armée que par le parlement.
Si l'on venait à mettre le feu aux poudres dans le Kurdistan syrien, cela ne manquerait pas d'avoir des conséquences majeures. En Turquie d'abord, bien entendu, mais aussi en Irak (où les kurdes exercent dans leur région la réalité du pouvoir et lorgnent vers d'importantes richesses pétrolières), et en Iran où la cohabitation est pacifique avec les mollahs.
La problématique kurde a été jusqu'à présent ignorée par la Communauté internationale à propos de la Syrie. Le risque d'explosion destructrice pour toute une région est pourtant bien réel.
Antoine Blanca
NB: On estime que les Kurdes, peuple indo-européen très attaché à sa langue, à ses traditions, et à sa culture, sont 30 à 35 millions. Les plus fortes populations se trouvent en Turquie, 20
millions environ ('capitale' Diyarbakir), en Irak, en Syrie et en Iran. Mais il y a des groupes minoritaires oeganisés un peu partout au Moyen Orient et en Asie centrale. La diaspora, elle aussi
très solidaire, est importante en Europe (Allemagne) et aux Etats-Unis.