Je ne me rendais pas compte, moi qui tente de suivre avec attention les pas du Brésil et des Brésiliens, à quel point les
socialistes, dans leurs versions multiples, nationales ou internationales, sont présents, actifs, singuliers aussi, dans cette communauté fédérale tout entière. Inévitablement donc, le
proche avenir du plus grand pays d'Amérique latine sera démocrate socialiste. Une situation unique au monde. Et à mes yeux, joyeuse.
Amis, ne quittez pas la lecture de ce 'papier', car le meilleur est à venir.
Après avoir rappelé que les Parti des Travailleurs est au pouvoir depuis 11 ans (2 mandats de 4 ans de Lula, 1 mandat en cours pour Dilma), que le Parti social-démocrate (PSDB) avait exercé, avec son fondateur, Fernando Henrique Cardoso*, la direction suprême du pays pendant les huit années précédentes, je redécouvre que le Parti socialiste brésilien, l'original, celui fondé par l'ancien gouverneur de l'Etat de Pernambouc, Miguel Arraês, combattant de première ligne de la dictature militaire (1964-1985), est de nouveau en pleine expansion.
Certes, actuellement, le PSB participe encore, avec deux ministres, au gouvernement de Dilma Rousseff. Mais les choses pourraient rapidement changer si le patron du parti, Eduardo Campos, confirme sa candidature à la présidentielle de l'an prochain. Lui-même ancien ministre de Lula, fort de sa solide expérience parlementaire et ministérielle, cet intellectuel de 48 ans, familialement lié à Arraês, est de toute manière très courtisé. On le comprend: non seulement son parti est uni, mais encore sa progression, dans le paysage politique, est-elle spectaculaire. Trente députés fédéraux (dans 16 Etats), 4 sénateurs, 6 gouverneurs et, aux municipales de l'an dernier, 433 maires, soit un gain de 40%.
Le PT de Lula et de la présidente en fonction, Dilma Rousseff, ont senti le danger à un moment où la progression du PIB marque le pas, où le 'miracle' fait une pause. Ami personnel de Campos, depuis de longues années, Lula lui a proposé un 'deal': "tu acceptes la vice-présidence en 2014 et nous te soutenons quatre ans plus tard pour la présidence. Un 'ticket' PT/PSB est donc envisageable, même si pour le moment le leader socialiste intensifie sa critique de la politique économique de Dilma...A suivre. A suivre aussi, parallèlement, les discussions entre le PSDB et le PS. 'On' a deux fers au feu. C'est que le Brésil est un pays où la démocratie s'accompagne de souplesse idéologique. Rien n'y est figé. En démocratie, discuter n'est pas trahir.
Pour achever cette photo de famille élargie, je me garderais d'oublier Marina Silva, l'ancienne ministre écologiste qui va annoncer la création de son nouveau parti. A gauche, lui aussi. Marina avait été candidate à la dernière présidentielle. 20% des suffrages: à prendre donc au sérieux cette amazonienne à l'aise dans la jungle politique...
Antoine Blanca
NB: que mes lecteurs de droite (s'il y en a) se rassurent. Les partisans d'un certain libéralisme, les conservateurs qui ne disent pas leur nom, existent aussi. A en croire, du moins, la grande presse, quotidienne ou hebdomadaire, de São Paulo...Et ses correspondants à Paris.
* Fernando Henrique Cardoso a été un opposant déterminé du régime militaire. Furieusement francophone il a vécu une
grande partie de son exil en France. Ses collègues universitaires le connaissent bien. Il a fondé le PSDB et a été par deux fois Président de son pays.