Le seul véritable drame auquel les héritiers présomptifs de l'UMP doivent faire face est essentiellement financier. Le trésorier a d'ores et déjà démissionné. Il aurait eu à gérer une dette équivalente à une année budgétaire, et les conséquences de la formation de groupes parlementaires dissidents au Sénat comme à l'Assemblée. Cela peut représenter jusqu'à 4 millions de recettes par an perdues pour le parti de la rue de Vaugirard.
Mais, encore une fois, le drame, sur le long terme, ne sera pas politique. Avec un, deux ou trois partis la droite
continuera d'exister et trouvera les moyens de l'union aux moments décisifs. La haine n'était pas moins forte entre Giscard et Chirac, entre ce dernier et Balladur, qu'elle ne l'est entre Copé et
Fillon.
A mon sens, ce que la crise actuelle a mis en évidence, c'est la fragilité des structures d'un parti unique rassemblant droite et centre-droit. Ces ambitieuses expériences ne se consolident qu'autour d'une personnalité bien établie au pouvoir ou ayant de bonnes chances de le conquérir.
Depuis la Libération la droite a compté des dizaines de formations. Sans véritable conséquences électorales d'ensemble. Ces divisions ne concernaient pas le rassemblement au moment opportun. Généralement pour remporter la victoire. Il y a sans doute des 'encartés UMP' aujourd'hui attristés par les malheurs de leur formation. Mais bientôt cela ne relevera que de l'anecdote.
Ce n'est pas le cas au PS. Ce parti a été fondé il y a 107 ans, en 1905, par l'unification de plusieurs groupes se réclamant de la gauche ouvrière. C'était alors le PS (Section française de l'Internationale ouvrière). En 1969 cette dernière précision, qui se voulait internationaliste, disparut du paysage. Ce fut la seule modification passée, d'ailleurs, politiquement inaperçue.
Dans la culture partisane socialiste la personnalité passe toujours après le choix d'orientation politique. Avant la 2e guerre mondiale, le parti était statutairement divisé en tendances organisées. Elles avaient leur autonomie, leur propre vie. Mais cela consolida la culture du débat, finalement tranché par le vote, souvent précédé d'un compromis. Ce dernier, dans les congrès, se concrétisait à la réunion dite 'des résolutions'. C'est pourquoi la seule grande scission qu'ait connu le socialisme français aboutit en décembre 1920 à la création du PCF.*
La tradition fait que la fidélité à la "carte du Parti"est émotionnellement très forte.
A l'UMP on prend ou on abandonne (voire on déchire) sa carte avec des états d'âme bien passagers. Parce qu'elle a été
acquise comme on achète un ticket de métro. Et qu'on la déchire comme on le fait d'un ticket de PMU. D'ailleurs dimanche dernier les membre de l'UMP ont voté 'en masse', ce qui ne représentait
que 55% des adhérents inscrits. Et un très grand nombre d'entre eux avaient donné procuration. Une procédure douteuse, ouvrant la porte à toutes les manipulations. Au PS les procurations sont
bannies.
Et les commentateurs ont rarement souligné le fait que, contrairement à ce qui s'était passé chez les socialistes, il ne s'agissait pas de 'primaires ouvertes'. Au PS il y avait eu 3 millions de
votants, chacun d'eux s'étant physiquement rendu dans son bureau de vote. A l'UMP ils étaient 160000, dont 40000 procurations**. Ce qui a été qualifié de 'vote massif'.
Sans commentaire.
Antoine Blanca
* En 1959 une dizaine de milliers de militants, souvent de grande qualité morale et intellectuelle, fondèrent le PSA, parti socialiste autonome. Ce dernier constitua l'un des éléments fondateurs du PSU, aujourdd'hui disparu.
** Comme il y avait eu 2 tours de scrutin, les électeurs ont été deux fois 3
millions. En outre le financement du vote était assuré